Le cimetière des Fontanelle est un ossuaire souterrain, qui occupe environ 3000 des 30 000 m² d'une grande cavité creusée dans le tuf.

Origine du lieu

Le quartier des Fontanelle, qui tire son nom des sources d'eau qu'on y trouvait autrefois, est situé sur l'un des bassins versants convergeant vers le quartier de la Sanità et faisant régulièrement l'objet d'inondations violentes et autres coulées de boues - le fameux phénomène appelé « Lava dei Vergini ». Pendant des millénaires, l'érosion y fit son œuvre, creusant les collines et découvrant le tuf dont était composé le lieu.

Au 17^ème siècle, il devient interdit à Naples d'extraire le tuf « intra-moenia » (dans les murs), imposant aux carrières de se déplacer « extra-moenia » (hors les murs). A l'évidence, le site des Fontanelle offre les conditions idéales pour cela : des cavités vont donc y être creusées, créant les espaces souterrains que va bientôt occuper le cimetière.

Un gigantesque ossuaire

Au 17^ème siècle, Naples vit une période terrible, pendant laquelle les malheurs se multiplient : épidémies, éruptions du Vésuve, tremblements de terre, insurrections populaires... Les morts sont nombreux, et la place manque dans cimetières des églises en ville où les morts sont habituellement inhumés. En particulier, les victimes de la grande peste de 1656 - entre 250 000 et 300 000, soit plus des 2/3 de la ville (!) - vont rejoindre en masse les Fontanelle, qui deviennent le principal lieu de sépulture de la ville. Le nouveau cimetière devient alors peu à peu le lieu d'inhumation des Napolitains les plus pauvres, qui ne peuvent s'offrir une sépulture en ville.

En 1837, les nombreuses victimes de la grande épidémie de choléra rejoignent à leur tour les Fontanelle. La même année, il est décidé de déplacer vers l'ossuaire les restes des personnes enterrées dans les tous cimetières des paroisses de la ville ; c'est la dernière étape pour l'ossuaire des Fontanelle, qui est bientôt laissé en l'état, à l'abandon. Mais si son histoire fut relativement brève, il aura accueilli un nombre difficilement imaginable de corps : plusieurs centaines de milliers, voire quelques millions. Si l'on estime à environ 40 000 le nombre de corps dont les restes sont aujourd'hui visibles, souvenez vous lorsque vous arpenterez ses allées que le sol sous vos pieds est rempli d'os sur plusieurs mètres de profondeur...

La réorganisation du cimetière au 19^ème siècle

En 1872, un chanoine de la cathédrale de Naples, Gaetano Barbati (est-ce un hasard ? San Gaetano, l'un des saints patrons de la ville, intervint pour chasser la peste de la ville en 1656, et sa statue orne aujourd'hui le cimetière), engage la réorganisation du cimetière abandonné, appuyé en cela par le cardinal Sisto Riario Sforza. Il trie les crânes, tibias, et fémurs, et les range sagement le long des allées de la cavité. Il crée enfin une église provisoire à l'intérieur de l'ossuaire.

Le choix dans le rangement des os rappelle les grandes époques de l'ossuaire, marquées dans les noms données aux trois allées de la cavité : dans celle derrière l'église, appelée la « navata dei preti » (l'allée des prêtres) sont disposés les os issus des églises de la ville ; au centre, la « navata degli appestati » (l'allée des pestiférés) accueille ceux des victimes de la peste ; enfin, les restes des pauvres ont trouvé le repos dans la « navata dei pezzentelli » (l'allée des déguenillés).

L'ère moderne, face au culte des âmes du purgatoire

Depuis le 17^ème siècle, le cimetière des Fontanelle fut l'un des principaux lieux d'exercice du fameux culte des âmes du purgatoire, considéré comme une tradition fétichiste et païenne par l'église catholique. C'est pour cette raison que le cimetière fut fermé en 1969, suite à l'interdiction de la pratique de ce culte par un tribunal ecclésiastique, mandaté par l'archevêque de Naples, Corrado Ursi.

Après une première et timide tentative de réouverture dans les années 80, le cimetière fut restauré et mis en sécurité en 2002 pour être réouvert au public, à nouveau sans succès ; l'ossuaire n'était accessible que lors du Maggio dei Monumenti (l'équivalent italien des journées du patrimoine françaises). Alors, en 2010, c'est la population du quartier qui intervint directement : elle occupa pacifiquement le cimetière, contraignant l'administration municipale à le réouvrir au public.

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