La nuit du 15 au 16 juillet sur la piazza Mercato

Sur la piazza Mercato se déroule au mois de juillet de chaque année la festa del Carmine, grande fête populaire et religieuse donnée en l'honneur de Notre-Dame du Carmel - patronne de l'Ordre du Carmel et de l'église voisine de Santa Maria del Carmine Maggiore. Les célébrations se concluent dans la nuit du 15 au 16 juillet par l'incendio del campanile (l'incendie du clocher de l'église) : une mise en scène pyrotechnique illume alors le plus grand clocher de Naples, simulant son embrasement, jusqu'à l'arrivée de l'icône de la Madonna Bruna qui vient miraculeusement éteindre le feu.

Cette tradition, dans sa forme, est spécifgiquement napolitaine. Mais comme bien souvent à Naples, la question des origines est entourée de légendes, mystères et superpositions : voici les éléments d'explication qui nous semblent les plus vraisemblables.

Une origine religieuse...

De manière certaine, la festa del Carmine s'inscrit dans la tradition catholique de la célébration de Notre-Dame du Carmel, qui a lieu le 16 juillet de chaque année. Traditionnellement, elle commémorerait l'apparition de la Vierge le 16 juillet 1251 à saint Simon Stock, supérieur général de l'Ordre du Carmel, pour lui remettre le scapulaire (partie principale de l'habit monastique) : outre son caractère miraculeux, cet événement symbolise cette période charnière du 13^ème siècle pour l'Ordre du Carmel, qui d'oriental et érémitique devient alors européen et monastique, mais se voit menacé par la réorganisation des ordres mendiants voulue par la papauté. Cette date pourrait toutefois également dériver de celle du concile de Lyon qui décida, le 17 juillet 1274, de la préservation définitive de l'Ordre du Carmel, grâce à l'intercession supposée de sa patronne : le 17 étant déjà pré-empté par Saint Alexis, la fête aurait été avancée d'un jour.

... et une origine populaire

Mais cette célébration religieuse n'explique manifestement pas la raison de l'incendie simulé du campanile. Celle-ci est à rechercher dans une autre tradition, populaire cette fois, qui se déroulait chaque année à la même période pour commémorer une bataille entre turcs et chrétiens. Les sources mentionnent la bataille de Goulette : sans doute s'agit-il de l'attaque de la ville de l'actuelle Tunisie le 14 juillet 1574 et qui vit quelques milliers de soldats de l'empire espagnol retranchés dans une forteresse faire face à des dizaines de milliers d'assaillants turcs (leur héroïsme n'allait toutefois pas empêcher la victoire turque et la prise prochaine de Tunis). Toujours est-il qu'un fortin de bois était mis en place sur la piazza Mercato, objet d'une lutte entre chrétiens et maures joués par la population, avant que le feu n'y soit finalement mis

On sait que la tradition populaire de l'incendie du fortin avait déjà cours à l'époque de Masaniello, car il en utilisa les préparatifs pour fomenter la révolte qu'il allait diriger en juillet 1647. Il semblerait que c'est d'ailleurs cela qui aurait conduit le pouvoir en place à supprimer cette célébration en tant que telle, n'en laissant subsister que l'incendie symbolique, devenu partie intégrante de la fête religieuse et bientôt transféré sur le campanile de l'église.

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